Défilé de Dwight Eisenhower célébrant la victoire en Europe, 10 juin 1945, photo de Philippe Capper via flickr, CC BY 2.0
Après la Seconde Guerre mondiale, l'Europe a été profondément marquée par les ravages et la reconstruction, tandis que les États-Unis sont sortis de la guerre en tant que puissance économique dominante. La prospérité économique américaine a attiré des centaines d'artistes européens fuyant le nazisme, les incitant à s'installer à New York.
Dans le contexte de la guerre froide, les États-Unis étaient perçus comme le symbole de la liberté, en opposition à l'Union soviétique. Avec le soutien de la CIA, New York est devenue la nouvelle capitale mondiale de l'art visuel. La ville a vu émerger un bouillonnement artistique, en particulier dans des mouvements tels que l'expressionnisme abstrait et le pop art, avec des artistes tels que Jackson Pollock, Mark Rothko, Willem de Kooning et Andy Warhol.
Cette période a été cruciale pour l'établissement de la scène artistique contemporaine, avec New York en tant que centre névralgique où les tendances artistiques et les mouvements novateurs ont continué à prospérer, façonnant l'art mondial dans les décennies suivantes.
Jackson Pollock Number 1A, 1948, photo de peiliny via flickr, CC BY-ND 2.0
Jean Goguen, Hommage à Claude Gauvreau, 1956, MBAC, photo jean-François Milette
Armand Vaillancourt, Sans titre, 1984, photo de Guy L'Heureux, Collection privée
Jean-Paul Riopelle, Composition, 1967, Collection Banque TD, photo de ya3hs3 via flickr, CC BY-NC-Sa 2.0
Exposition des automatistes de 1947, photo de picryl, domaine public
Marcella Maltais, Sans titre,1956, fondation Marcella Maltais, photo jean-François Milette, Collection privée
Le mouvement surréaliste, fondé par André Breton, avait pour objectif de libérer le pouvoir créateur de l'inconscient. En réaction à l'art abstrait géométrique jugé froid et stérile, le surréalisme explore l'expression de l'inconscient à travers le hasard.
L'expressionnisme abstrait, notamment l'Action painting (1947-1965), est caractérisé par des artistes américains tels que Pollock, De Kooning, Kline et Motherwell, qui expriment leur subconscient en peignant sur de grandes toiles étendues au sol. Ils introduisent le concept de "allover", éliminant ainsi un point central fort sur la toile, et développent la technique du dripping. En parallèle, des artistes canadiens tels que Jean Goguen et Armand Vaillancourt ont également exploré ces techniques.
L'abstraction lyrique (1945-1960), également appelée tachisme ou art informel, est développée par des artistes français tels que Riopelle, Mathieu, Wols, inspirés par la nature et les dernières œuvres abstraites de Monet.
Les Automatistes (1942-1954), un mouvement canadien fondé par Paul-Émile Borduas, s'inspire de l'écriture automatique de Breton. Ils créent des peintures fond-forme en laissant leur subconscient s'exprimer à travers des formes abstraites. Des artistes comme Marcella Maltais ont contribué à ce mouvement au Canada.
Barnett Newman, The Way I, 1951, MBAC, photo Jean-François Milette
Clyfford Still, 1949-G, 1949, MBAC, photo Jean-François Milette
Mark Rothko, No. 14, 1960, sfmoma, photo de Wally Gobetz via flickr, CC BY-NC-ND 2.0
Paul-Émile Borduas, Composition 11, 1957, kunst_i_Canada, CC BY SA 3.0
Le Color field est une variante du mouvement expressionnisme abstrait américain.
Il met l'accent sur des aplats de couleur juxtaposés. Borduas, influencé par ce mouvement lors de son séjour à New York, intègre cette approche dans ses œuvres noir et blanc. Borduas laissera donc tomber l'appoche automatiste.
Les artistes américains Barnett Newman, Clyfford Still et Mark Rothko sont des représentants majeurs de cette période.
Morris Louis, Beta Zeta, 1960/1961, photo de Dmitry Sakharov via flickr, CC BY-NC 2.0
Helen Frankenthaler, Fire,1961, photo de Rob Corder via flickr, CC BY-NC 2.0
Kenneth Lochhead, Détail de Carré gris, 1963, MBAC, photo Jean-François Milette
Kenneth Noland Cirium, 1964, photo de Ali Eminov via flickr, CC BY-NC 2.0
Frank Stella, Conway III, 1966, photo de Rob Corder via flickr, CC BY-NC 2.0
L'abstraction postpicturale, en réaction à l'expressionnisme abstrait jugé trop gestuel et émotif, a été conceptualisée par le critique d'art new-yorkais Clement Greenberg. Pour que la peinture soit considérée comme complètement abstraite selon ce mouvement, il ne doit y avoir aucune trace visible du geste de l'artiste, aucune ligne horizontale évoquant l'horizon. Les toiles doivent présenter uniquement des aplats de couleur et explorer les relations entre ces couleurs.
Les œuvres d'art abstrait postpictural ne sont pas apprêtées, et la peinture est diluée et appliquée de manière à ne pas créer d'épaisseur sur la toile. Les techniques du hard-edge, caractérisées par des bords nets et délimités, ainsi que l'utilisation de lavis et de zones de couleur coulées, sont couramment employées dans ce mouvement. L'accent est mis sur la simplicité formelle, la géométrie, et la recherche d'une abstraction totale, sans référence à la réalité ou à l'expression subjective de l'artiste.
Claude Tousignant, 33, 1958, Art mûr, photo Guy L'Heureux, Collection privée
Claude Tousignant, 𝘈𝘤𝘤𝘦𝘭𝘦𝘳𝘢𝘵𝘦𝘶𝘳 𝘊𝘩𝘳𝘰𝘮𝘢𝘵𝘪𝘲𝘶𝘦, 1968, StacieBee via flickr, CC BY-NC-SA
Guido Molinari, Bi-sériel vert-bleu, MBAM, photo de William Klos via flickr, CC BY 2.0
Rita Letendre,Encounter, 1967, Simon Blais, photo Guy L'Heureux, Collection privée
Guido Molinari,Quantificateur pourpre,1992, Collection privée
Les plasticiens, en réaction aux excès de gestes et d'émotivité ainsi qu'au manque d'abstraction des automatismes, ont émergé comme un mouvement artistique à Montréal en 1955. Le critique d'art et peintre Jauran, Louis Belzil, Jean-Paul Jérôme et Fernand Leduc ont publié le manifeste des plasticiens, prônant une peinture géométrique aux couleurs sobres, influencée par le cubisme parisien.
Guido Molinari et Serge Tousignant ont été des figures clés du mouvement des plasticiens, également appelés seconds plasticiens. S'inspirant de ce qui se passait à New York, en particulier sous l'influence de Piet Mondrian et Barnett Newman, leur style était Hard-edge avec des couleurs vives. Tousignant a réalisé un monochrome orange en 1956, tandis que Molinari a créé des tableaux noir et blanc hard-edge la même année.
Dans les années 60, Molinari a développé ses œuvres avec des bandes verticales de largeur identique, tandis que Tousignant a exploré le motif des cibles. Comme les artistes de l'Op-Art, ils ont utilisé des illusions visuelles pour donner l'illusion d'un espace tridimensionnel, en jouant avec la perception du spectateur.
Jean Dubuffet, Dialogue aux oiseaux,1949,photo Jean-Louis Mazieres via flickr, CC BY-NC-SA
L'art brut, à l'instar du mouvement Dada, se positionne comme un mouvement anti-art. Jean Dubuffet a joué un rôle majeur dans la création de ce mouvement en mettant en avant des artistes qui n'avaient jamais étudié l'art et n'avaient jamais été exposés à aucune forme artistique. Souvent issus d'hôpitaux psychiatriques, ces artistes ne sont pas influencés par le monde extérieur, ce qui les rend totalement libres dans leur processus créatif.
Les membres du mouvement CoBrA partagent une approche similaire, privilégiant des formes plates et enfantines caractérisées par des contours bruts et une peinture épaisse. Cette esthétique reflète une volonté de s'éloigner des conventions artistiques établies et de favoriser la spontanéité et l'authenticité dans la création artistique. L'art brut et le mouvement CoBrA témoignent d'une rébellion contre les normes artistiques traditionnelles et célèbrent une expression artistique dégagée de toute contrainte académique.
Jasper Johns, Figure 7,1955, LACMA, photo de Rob Coder via flickr, CC BY-NC 2.0
Robert Rauschenberg, Canyon, 1959, MoMA, photo de profzucker via flickr, CC BY-NC 2.0
Le néo-dada est un mouvement artistique qui a émergé en réaction à l'expressionnisme abstrait, jugé trop élitiste. Inspiré par les ready-made de Duchamp, le néo-dada a adopté une approche provocatrice en utilisant des objets ordinaires du quotidien comme matériaux artistiques.
Ce mouvement a ouvert la voie au Pop-Art, un courant artistique majeur qui a émergé dans les années 60. Le Pop-Art s'est caractérisé par l'utilisation de symboles de la culture populaire, de la publicité, et d'objets de consommation de masse dans l'art. Les artistes pop, tels que Jasper Johns, ont intégré des éléments visuels du quotidien dans leurs œuvres, remettant en question les distinctions entre l'art élevé et la culture populaire.
Les peintures de Jasper Johns, notamment celles avec des chiffres, illustrent cette transition vers le Pop-Art et témoignent de l'influence du néo-dada dans l'évolution de l'art contemporain.
Les ''combine paintings'' de Rauschenberg mélangent la sculpture, la peinture, le collage et les styles pop-art et expressionniste.